Paris, le 8 novembre 2022
Nos associations, le Collectif Féministe Contre le Viol, Osez le Feminisme!, l’Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail (AVFT), Du Côté des Femmes, En Avant Toute(s), Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF) et la Fondation des Femmes, ont découvert via un article du Journal Du Dimanche l’existence d’une dépêche interministérielle en direction des procureurs de la République, qui aurait débouché sur des classements sans suite massifs et un déni de justice pour des milliers de victimes.
Un classement sans suite désigne l’arrêt d’une procédure judiciaire consécutive à une plainte. C’est le procureur de la République qui en prend la décision. Dans une dépêche de mai 2021, il a été demandé d’accélérer le classement sans suite de nombreuses plaintes pour désengorger les commissariats et services d’enquêtes.
Nous rappelons que 5 ans après #MeToo, les plaintes pour violences sexistes et sexuelles ont presque doublé. Nous rappelons qu’il a été reproché aux femmes victimes de s’exprimer sur les réseaux sociaux ou dans les médias plutôt que de porter plainte. Nous rappelons qu’elles ont fortement été incitées à porter plainte et que dans ce contexte plus que tout autre, il n’est pas acceptable que tout ou partie de ces plaintes aient été destinées à la poubelle. Si tel était le cas, cela relèverait d’une hypocrisie insupportable de la part de nos institutions et serait extrêmement préjudiciable à la confiance si fragile qu’ont les victimes de violences sexistes et sexuelles aujourd’hui vis-à-vis de notre système judiciaire.
La dépêche ne dit pas si des crimes ou délits sont exclus. Nous demandons donc le plus rapidement possible un état des lieux sur ce qui semble être un véritable scandale : combien de plaintes pour violences sexistes ou sexuelles ont été ainsi classées pour des raisons étrangères à la faiblesse probatoire des dossiers? Nous souhaitons que toute la transparence soit faite et demandons au Ministère de la justice de faire rouvrir toutes les enquêtes qui auraient été classées sans suite dans ces conditions.
Les associations ont constamment alerté, depuis les premiers jours de #MeToo sur le manque de moyens dédiés à l’accompagnement, au suivi et aux procédures juridiques. Il était prévisible qu’une hausse sans précédent de plaintes, sur des services déjà surchargés et sous dotés, entraînerait une situation d’engorgement difficile à résoudre.
Nous demandons, à l’heure où le budget est en discussion au parlement, l’affectation immédiate d’un budget de 1 milliard à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, permettant, entre autres, de financer à la hauteur des besoins y compris d’enquête.